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25 ARTS SECONDE 2023 -
LES HEURES SAUVAGES -
CENTRE WALLONIE BRUXELLES -
LE SOLEIL TOUT ENTIER NE SE TROUVE NULLE PART -
VILLE DE PARIS
PROJECTION EN LIGNE 25 ARTS SECONDE
CENTRE WALLONIE BRUXELLES
Du 13 au 29 octobre 2023
Sélection de films en ligne opérée par le curateur Andy Rankin
La fin du monde ne me concerne pas, je peux tout à fait vivre sans lui. Ralph Waldo Emerson
4,5 milliards d’années
L’analogie est connue : si l’on réduit proportionnellement la durée de l’existence de l’univers à une journée de 24 heures, le big-bang se produit à minuit et une seconde, la planète Terre se forme aux alentours de 16:00 et l’humanité n’apparaît qu’à 23:59:59. Perdu dans cette vaste échelle temporelle, nous ne sommes pas grand-chose, mais nous avons toutefois le pouvoir de bouleverser durablement l’équilibre planétaire. Cette sélection d’art vidéo rend ainsi hommage au blockbuster le plus invraisemblable jamais produit ; un film long de plus de 4,5 milliards d’années: le biopic de notre planète. Le synopsis est des plus alléchant : recomposition perpétuelle et silencieuse des continents, des montagnes et des océans; extinction du vivant à répétition; explosions magmatiques et tremblements rocheux. Un temps géologique qui dépasse de loin tout entendement humain, et qu’aucune âme ne sera jamais capable d’éprouver du début à la fin. Une force immuable qui est à l’origine de tout ce que nous voyons, et qui nous survivra si nous continuons à habiter le monde tel que nous le faisons aujourd’hui. La première image animée jamais produite est mentale et intime. Quiconque a déjà fixé un objet immobile durant un temps long a pu vivre cette sensation de tremblements qui agite notre vue. Au bout d’un certain temps, la réalité observée semble prise de spasmes rétiniens, d’oscillations optiques, comme autant de persistances visuelles perturbées. Plaisir fugace qui disparaît aussi vite que l’on se frotte les yeux ou que l’on meut notre pupille. Sans doute est-ce cette distraction que cherchaient certains esthètes japonais en s’entourant de suisekui. Ces fragments de roches sinueuses montés sur socles sont érigés au rang d’œuvre d’art. Ils rappellent un paysage escarpé et sont longuement examinés lors de séances de méditation. Ces rochers sont un condensé de paysage, un résumé de notre longue histoire minérale. Peut-être est-ce pour ces mêmes qualités que certains artistes de cette sélection ont fait de la roche l’héroïne de leurs vidéos. Qu’elle soit sculptée, parlante ou errante, la roche est le témoin de temps immémoriaux et primitifs. De l’autre extrémité de la flèche du temps, dans l’ultime seconde du cadran, apparaît le genre humain. Si les générations qui nous ont précédées sont celles des pyramides, murailles et cathédrales, la nôtre est celle des polymères, pesticides et autres perturbateurs endocriniens. Nos sols sont pollués, nos écosystèmes déréglés, nos paysages balafrés, mais nous poursuivons notre existence dans un système capitaliste, extractiviste et dominant comme si de rien n’était. Une insoutenable inaction qui est à l’origine de certaines vidéos présentées ici. Si nous sommes hélas trop nombreux à regarder ailleurs, ces artistes nous mettent face à la réalité d’un monde détruit ou sur le point de l’être. D’autres artistes nous montrent ce que bientôt ne sera plus, dans des séquences d’une merveilleuse simplicité végétale. L’horloge de l’Apocalypse tente de nous prévenir de l’imminence de la fin des temps. Sur ce cadran, elle est programmée pour minuit. Les aiguilles reculent ou avancent en fonction de l’imminence des dangers existentiels de notre espèce. Le conseil scientifique qui en a la charge la met régulièrement à jour. A l’heure où ces lignes sont écrites, elle affiche 23:58:30, suite à la guerre en Ukraine et à l’approche de catastrophes écologiques. Il ne nous reste ainsi plus que 90 secondes symboliques pour jouir des plaisirs terrestres. Que ces ultimes secondes soient celles de 25 arts seconde !